Avec un milliard de dollars en 2018 et encore un milliard de dollars en 2019, les investissements dans les projets immobiliers ont fait pousser les grues comme le riz sous la mousson. 
 

De l’ancienne Sihanoukville, il reste encore, au hasard des rues défoncées par les bétonneuses et les poids-lourds éreintés de ferraille, des bouts de quartiers des années soixante encerclés par des chantiers tendus vers le ciel. 
 

D’ici peu, à certains endroits, on ne verra plus la mer, une fois qu’elle aura été privatisée par des programmes hôteliers peu soucieux du partage de l’espace public.

Ailleurs, les côtes encore vierges de toute construction il y a peu ressembleront bientôt à une ville nouvelle chinoise avec leurs grossières barres d’appartements balafrant l’arrière-pays.
 

Le soir, ici la ville étincelle des mille feux de ses casinos et hôtels, là, entre deux palissades de chantier où se meurt un terrain vague, le sombre décor attriste l’âme.

Et, bien qu’à deux pas la mer, de nuit comme de jour, nulle chance d’y être bercé par le doux bruissement des ondes marines: le grondement des chantiers et des camions ne s’arrête jamais.
 

À une vitesse phénoménale, la nouvelle Sihanoukville efface l’ancienne, s’impose où il n’y avait que du vent et du sable et fait clignoter ses enseignes en chinois dans la nuit khmère tandis qu’une nouvelle population y prend ses aises.
 

La semaine dernière, le Premier ministre a lancé un chantier de 294 millions dollars dont 100 millions du budget de l’Etat, pour, d’ici un an, construire ou réhabiliter routes et ponts et rendre à nouveau la cité praticable à la circulation. 
 

Sihanoukville a devant elle un futur prometteur, a jugé le premier ministre, la voyant comme le deuxième centre économique du pays après Phnom Penh, pouvant être à la fois une place financière internationale comparable à Hong Kong et un haut lieu du tourisme mondial donnant au pays tout entier un nouvel élan.

Son avenir sera-t-il à la hauteur de ces espérances ? 

Il est bien trop tôt en juger.  

 
Mais, alors qu’il est impossible de revenir en arrière, un échec serait un immense gâchis pour le Cambodge.