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Coopération française et Francophonie, quels fruits en 20 ans?
20, Mar 2018 , 9:41 am        
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Pierre Gillette, ancien rédacteur en chef de Cambodge Soir, a été depuis 1995 un témoin de l'action de la coopération française et de la Francophonie au Cambodge. Moins présente aujourd'hui, cette coopération a été très importante dans les années 1990 alors qu'il fallait accompagner la reconstruction du pays. Elle a eu en particulier un rôle très important dans les secteurs de la santé, de l'enseignement supérieur et, aussi, des médias.



Entretien avec Pierre Gillette:

Ky Soklim- Vous êtes au Cambodge depuis plus de 20 ans et vous avez été un témoin direct des actions de la coopération française et de la francophonie au Cambodge. Pour vous, quels sont les fruits de cette coopération? Donnez-moi des exemples!

Pierre Gillette- L’action de la coopération française est aujourd’hui beaucoup moins visible qu’elle ne l’a été au lendemain de la signature des Accords de paix de Paris et des élections de 1993. Dans les années 90, la France a été parmi les plus gros contributeurs à la reconstruction du pays.

Avec la Francophonie, elle a joué un rôle majeur par exemple dans le secteur de la santé et de l’éducation supérieure. Regardez l’ITC, l’hôpital Calmette, l’Institut Pasteur. Voilà quelques-uns des  fruits visibles de cette coopération.  À cette époque, ces secteurs-là étaient dans un état de misère qu’on a du mal à imaginer aujourd’hui.

Parmi les fruits ce cette coopération, il y a aussi le travail superbe qui a été fait pour la restauration du patrimoine culturel du Royaume, à Angkor, au Musée national ou en faveur du Ballet royal et de la préservation de manuscrits anciens. Il y a eu aussi tout le soutien apporté au pays à travers des financements à des ONG agissant dans la santé, l’aide à l’enfance, l’éducation, dont le SIPAR est un bel exemple.

Et puis, s’il n’y a quasiment plus de mines anti-personnel dans le pays, c’est aussi grâce à cette coopération.

Ky Soklim- Dans quels secteurs la France et la Francophonie sont-elles particulièrement intervenues pour la formation des ressources humaines et avec quels résultats ?

Pierre Gillette-
À mon avis, elles ont été particulièrement efficaces dans le domaine de la médecine. Des dizaines de médecins dans toutes les spécialités ont bénéficié de bourses de formation en France et des dizaines de coopérants français sont venus au Cambodge former des personnels de santé. L’ITC est aussi un bel exemple d’un investissement plutôt réussi de cette coopération dans le domaine de l’Education supérieure. Il a eu un soutien avec des résultats intéressants dans le domaine de la formation au droit.

Ky Soklim- Vous étiez le rédacteur en chef du journal Cambodge-Soir et beaucoup de journalistes francophones ont travaillé avec vous. Pouvez-vous expliquer l'importance de la formation journalistique financée par la coopération française et de la Francophonie dans les années 90?


Pierre Gillette- Au début des années 90, il y avait, au sein du département des Etudes francophones de l’URPP, une option journalisme animée par des professionnels français et c’est de cette option que sont venus presque tous les journalistes cambodgiens ayant travaillé à Cambodge Soir ou à l’émission d’information en français de TVK. Il y avait aussi des programmes de bourses pour que certains aillent en formation dans des écoles françaises de journalisme.

Donc il a eu un gros effort dans ce domaine, qui a permis l’existence de Cambodge Soir, et surtout, c’est le plus important pour moi, de diffuser un savoir-faire journalistique dans le monde des médias cambodgiens puisque nombre d’anciens journalistes de Cambodge Soir occupent maintenant des positions importantes dans les médias, voire en dirigent, comme c’est le cas de Thmey Thmey. Bien sûr, le contexte de leur travail aujourd’hui n’est plus le même qu’à l’époque mais je pense qu’ils représentent un apport important dans le paysage journalistique du pays

Ky Soklim- Certains vous appellent un pilier de la Francophonie au Cambodge. Regrettez-vous la disparition des journaux francophones au Cambodge? Souhaitez-vous qu'un journal francophone existe à nouveau?


Pierre Gillette- Aujourd’hui, pour s’informer en français sur le Cambodge, il reste le magazine trimestriel Cambodge Mag et, sur internet, lepetitjounal.com. Mais ce sont des médias faits par des expatriés et plutôt pour des lecteurs expatriés.

Cambodge Soir était un journal avec une rédaction franco-cambodgienne qui traitait de l’actualité nationale du Cambodge en cherchant d’abord à intéresser les Cambodgiens francophones. Nous n’étions pas le journal des expatriés francophones au Cambodge.  Il y a avait même une traduction en khmer de certains articles pour élargir le lectorat à un public de Khmers non francophones. Et c’est cela qui m’intéressait. Nombre de dirigeants du pays étaient à cet époque francophones et nous lisaient, tout particulièrement Sa Majesté le Roi Père Norodom Sihanouk qui commentait et annotait chacune de nos éditions.

Il me semble qu’un journal comme Cambodge Soir a été très utile à la Francophonie car il lui donnait de la visibilité et, par la production d’information de qualité, la rendait utile auprès du public cambodgien.

Recommencer un journal comme Cambodge Soir? Sans un soutien financier institutionnel, impossible. Mais cela n’est pas dans les priorités de l’Organisation de la Francophonie et c’est bien dommage.

Ky Soklim- Pour certains, le français risque de disparaitre au Cambodge face à l'influence de l'anglais et du chinois. Selon vous, comment redonner ici de la valeur à la Francophonie?


Pierre Gillette- Je ne vois pas l’intérêt de le l’Organisation de la Francophonie si elle ne met pas de moyens pour rendre visible la langue française dans les pays, comme le Cambodge, qui appartiennent  à l’Organisation internationale de la Francophonie. La disparition de médias en langue française ne fait qu’amplifier le recul de langue française.


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